LEONARDO PADURA
L'homme qui aimait les chiens
Traduction de l'espagnol (Cuba) de Elena Zayas et René Solis
Londres, 22 août 1940 (TASS). - Communiqué de la radio londonienne : « Léon Trotski est décédé aujourd 'hui dans un hôpital de Mexico, des suites d'une fracture du crâne, victime d'un attentat perpétré la veille par une personne de son entourage immédiat. »
Leandro Sânchez Salazar : Il ne se méfiait pas ?
Détenu : Non.
L.S.S. : Vous n'avez pas pensé que c'était un vieil homme sans défense et que vous agissiez avec la plus grande lâcheté ?
D. : Je ne pensais rien.
L.S.S. : Vous vous êtes éloignés de l'endroit où il donnait à manger aux lapins, de quoi parliez-vous en marchant ?
D. : Je ne me souviens pas s'il parlait ou non.
L.S.S. : Il n'a pas vu que tu prenais le piolet ?
D. : Non.
L.S.S. : Juste après que tu lui as asséné le coup, qu'a-t-il fait ?
D. : Il a sauté comme s'il était devenu fou, il a crié, comme un fou, je me souviendrai toute ma vie du son de ce cri.
L.S.S. : Montre-moi comment il a fait, vas-y.
D. : A............ a......... a......... ah...... ! Mais très fort.
(Extrait de l'interrogatoire de Jacques Mornard Vanden-dreschs ou Frank Jacson, assassin présumé de Léon Trotski, mené par le colonel Leandro Sânchez Salazar, chef du service secret de la police de Mexico D.F.., dans la nuit du vendredi 23 et à l'aube du samedi 24 août 1940.)